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Comment policiers et gendarmes pourraient bientôt utiliser des drones

Démonstration de drone à Saint-Astier devant le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, ce lundi. NICOLAS TUCAT/AFP

Le ministère de l'Intérieur envisage de pouvoir équiper les forces de sécurité de drones. Si quelques expérimentations ont déjà eu lieu, le cadre juridique reste entièrement à définir.

Policiers et gendarmes pourront-ils bientôt surveiller une manifestation ou mener des enquêtes à l'aide de drones? C'est en tout cas le souhait du ministère de l'Intérieur qui réfléchit sérieusement à cette possibilité. Les forces de sécurité pourraient les utiliser «dès lors qu'ils ne portent pas atteinte aux libertés», a déclaré lundi le ministre Bernard Cazeneuve. Mais quels usages concrets pourraient-elles en faire? Comment respecter vie privée et utilisation des drones? Éléments de réponses.

Policiers et gendarmes utilisent-ils déjà des drones?

Oui, mais cette utilisation reste encore au stade de l'expérimentation. C'est notamment le cas à Saint-Astier en Dordogne, où le ministre de l'Intérieur s'est rendu lundi. Ce centre national d'entraînement des forces de gendarmerie expérimente depuis plusieurs mois trois drones. À l'occasion de cette visite, le ministre a assisté à une démonstration, utilisant l'un de ces engins volants dans le cadre d'une opération de maintien de l'ordre. Ces drones, qui peuvent voler jusqu'à 3000 mètres d'altitude et qui ont une capacité de vol pouvant aller jusqu'à deux heures, peuvent être utilisés lors d'émeutes ou de grandes manifestations pour repérer les mouvements de foule et éviter les débordements. Dans cette perspective, un test grandeur nature a été réalisé le mois dernier lors d'un match de ligue 2 à Créteil, en vue de l'Euro 2016 qui se déroulera en France. Mais pour l'instant, il n'y a aucun prototype techniquement opérationnel, précise-t-on au ministère de l'Intérieur.

Quelles utilisations possibles par les forces de sécurité?

Pour les policiers et les gendarmes, les drones amélioreraient considérablement leurs conditions de travail. «On pourrait être beaucoup plus efficaces au sol en ayant un ½il téléporté dans les airs, pense Christophe Crepin de l'Unsa-police. On pourrait s'en servir contre la criminalité organisée (trafic de stupéfiants, par exemple), dans les violences urbaines ou encore lors de prise d'otages», suggère le policier joint par Le Figaro. Les drones ont aussi cet avantage de se faufiler dans des endroits difficiles d'accès. «Dans le cadre d'investigations, cet outil nous permettrait d'enquêter plus facilement dans des quartiers sensibles», explique à son tour Stanislas Goudon du syndicat de police Alliance. «Mais attention, prévient Christophe Crepin, il ne s'agit pas de mettre un drone derrière chaque citoyen. Il faut que les gens comprennent que c'est juste un support technique pour les équipes au sol».

Quelle sécurité pour ces drones?

De manière générale, l'utilisation des drones n'est pas sans risque. Mal contrôlé, l'appareil volant peut interférer avec d'autres types d'engins volants (ULM, hélicoptères, les avions en phase de décollage ou d'atterrissage). S'il survole une zone peuplée, l'appareil télécommandé peut potentiellement tomber sur la foule. C'est pourquoi le ministre de l'Intérieur tient à ce que ces drones soient utilisés «dans un cadre technologiquement maîtrisé». «Il faut que nous ayons toutes les garanties réglementaires», a-t-il ajouté. Pour l'heure, la réglementation des drones reste très mince et ne concerne que les engins civils. Seuls deux arrêtés (très complexes) datant d'avril 2012 encadrent la conception, l'utilisation de ces engins et de l'espace aérien, pour garantir la sécurité publique. Une réglementation spécifique aux drones de sécurité publique est donc à inventer.

Comment concilier vie privée et drones policiers?

Dès lors qu'il est équipé d'un appareil photo, d'une caméra mobile, d'un capteur sonore ou encore d'un dispositif de géolocalisation, un drone peut potentiellement porter atteinte à la vie privée, en captant et diffusant des données personnelles. «Mais actuellement, il n'existe aucune réglementation spécifique concernant les drones (y compris civils) et la vie privée, explique au Figaro Me Betty Sfez, spécialisée en droit des nouvelles technologies. Il faut se reporter à l'article 9 du Code civil pour garantir le droit à l'image et à la loi liberté et informatique pour la collecte des données personnelles», précise l'avocate.

Faut-il aller plus loin, surtout s'agissant de «drones policiers»? «Le législateur devra sûrement affiner le cadre réglementaire existant», pense Me Sfez. «Cette réglementation pourrait s'inspirer du régime de vidéoprotection», suppose de son côté Édouard Geffray, secrétaire général de la Cnil, qui travaille sur ces questions depuis 2012. Cette réglementation, qui exige que le public soit informé et interdit de filmer l'intérieur des habitations, risque d'être toutefois insuffisante. «Dans le cas de drones mobiles, il faudra probablement informer la personne filmée», relève le responsable de la Cnil. «Mais comment?», demande-t-il. Tout reste à faire.

Combien ça va coûter?

Au cours des trois prochaines années, quelque 108 millions vont être investis dans la modernisation de l'équipement de la police et la gendarmerie, sans préciser la part consacrée aux drones. «Il ne faudrait pas que le budget alloué aux drones empiète sur celui des unités de terrain», prévient Stanislas Goudon. Une crainte partagée par Christophe Crepin de l'Unsa-police, qui rappelle que les drones ne pourront jamais remplacer le travail d'un policier au sol.



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